Les tout derniers résultats publiés par les sociétés de télécommunications en Europe sont en effet encourageants. Orange, qui a été le premier à publier ses résultats du troisième trimestre le 22 octobre dernier, a affiché, pour la première fois depuis 2009, une hausse de son chiffre d’affaires ainsi que de son résultat opérationnel. Le groupe continue de voir la tendance s’améliorer dans toutes ses régions, même en Europe où le déclin du chiffre d’affaires s’amenuise de trimestre en trimestre alors que l’activité reste très soutenue en Afrique et au Moyen-Orient. La croissance est même revenue en Belgique où le groupe est actionnaire principal de Mobistar. Depuis l’annonce de ces résultats, Orange a enregistré une forte progression de son cours de bourse et a rattrapé son retard par rapport au secteur.
L’allemand Deutsche Telekom a également publié de bons résultats trimestriels, bien qu’en ligne avec les attentes, et avec un chiffre d’affaires toujours tiré par la robustesse de sa filiale américaine T-Mobile US.
Telefonica a, quant à lui, délivré des résultats encourageants avec un retour à la croissance en Espagne et une bonne résistance de sa division Amérique Latine même si les marges sont en baisse, impactées par le Brésil.
Enfin, Vodafone a clôturé la saison avec des résultats meilleurs qu’attendus, confirmant la tendance décrite ci-dessus et avec une guidance relevée pour cette année. Le bénéfice d’exploitation est de nouveau en hausse, les investissements massifs portent leurs fruits, notamment dans le data, et l’IPO (Initial Public Offering) de la division indienne est toujours d’actualité. L’Europe réussit à Vodafone et le groupe britannique a même annoncé qu’il allait publier ses résultats en euro dès avril 2016. Une décision surprenante mais qui fait sens car l’euro est la première devise de l’opérateur.
Nous le voyons, la situation en Europe s’améliore et la croissance est de retour pour certains opérateurs dans plusieurs pays (Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Suisse, Royaume-Uni, Espagne). Certes, elle est encore faible et ce sont surtout les pays émergents qui continuent à masquer la croissance négative globale en Europe. Avec un chiffre d’affaires en hausse pour Orange au troisième trimestre, les quatre opérateurs européens majeurs sont à présent tous dans le vert alors que les Swisscom, TeliaSonera ou Telenor le sont depuis longtemps (et plus récemment pour Proximus).
Enfin, nous noterons un changement de cap important qui ressort des derniers résultats avec l’annonce de TeliaSonera de se concentrer sur son marché scandinave et de se séparer de ses activités en Eurasie, notamment pour des problèmes de soupçons de corruption en Ouzbékistan qui affectent le business dans la région et également l’image du groupe. Pour des raisons similaires, Telenor, son voisin norvégien, a annoncé récemment vouloir se séparer de sa participation dans l’opérateur Vimpelcom, très présent en Russie et ses alentours ainsi qu’en Italie. Des problèmes de corruption, en Ouzbékistan toujours, ont également poussé le groupe à vendre cette participation malgré le cours plancher en bourse (participation cotée aux Etats-Unis). Une autre preuve du recentrage sur l’Europe est le projet d’IPO des activités hors Europe d’Orange, axées sur l’Afrique. Une vente de la filiale US de Deutsche Telekom est également possible à moyen-terme. La rentrée de cash pour ces grands groupes permettrait donc d’investir ou de faire de nouvelles acquisitions sur le Vieux-Continent où le secteur des télécommunications continue de s’agiter.
Le parlement européen a récemment voté la fin des frais de roaming1 avec comme date butoir juin 2017. Ces coûts ont longtemps été bien trop élevés et ont permis de générer des bénéfices controversés pour les opérateurs présents dans plusieurs pays européens (Orange, Vodafone, Deustche Telekom, …). Ils ont depuis été fortement réduits et seront à nouveau réduits dès avril 2016 pour être ensuite définitivement abolis en 2017. Beaucoup d’investisseurs voient dans cette mesure un risque pour le secteur, le roaming pouvant générer près de 8% du chiffre d’affaires et 5% du bénéfice opérationnel des opérateurs en Europe.
Il faut cependant rester réaliste. La fin des frais de roaming va certes impacter les résultats des opérateurs, mais cette annonce ne date pas d’hier et les opérateurs se préparent à ce changement depuis bien longtemps. Les investissements massifs dans la fibre ou les réseaux (Vodafone en tête), les rapprochements avec les câblos et la consolidation générale du secteur en sont une des conséquences. De plus, la hausse du volume des communications résultant de cette disparition des frais de roaming va être positive pour les groupes bien implantés en Europe comme Deutsche Telekom ou Vodafone. Un changement dans le secteur qui n’a donc pas que des inconvénients et qui entraîne également moins de tracasseries administratives pour les opérateurs.
Nous avons récemment revu notre avis sur le secteur des télécoms de neutre à surpondérer étant donné les évolutions positives du secteur et les perspectives à moyen terme. Le faible poids du secteur dans l’indice européen Stoxx 600 (moins de 5%) justifie aussi une recommandation plus positive sur le secteur, avec une capitalisation boursière totale relative au marché européen à un plus bas historique.
En Europe, nous privilégions Vodafone pour son leadership sur le mobile, son exposition géographique et sa politique d’investissement et de renforcement dans le domaine de la téléphonie fixe et mobile. Nous apprécions également Orange pour sa politique de dividende prudente mais aussi pour le potentiel offert par l’exposition africaine, espagnole et surtout française où une consolidation du secteur est toujours possible à moyen terme.