Le sort des sociétés civiles immobilières

Le sort des sociétés civiles immobilières

après la nouvelle convention conclue entre la Belgique et la France
La Belgique et la France ont signé une nouvelle convention préventive de la double imposition en matière d’impôt sur les revenus et sur la fortune. Cette convention remplacera l’actuelle à partir du 1er janvier 2023 et s’appliquera aux revenus perçus à partir de cette date.

De nombreux résidents belges ont acquis un bien immobilier en France par l‘intermédiaire d’une société civile immobilière (« SCI »). Une SCI est en règle translucide : elle a la personnalité juridique en France, mais est considérée comme fiscalement transparente (sauf si la société a opté pour son assujettissement à l’impôt sur les sociétés) en telle sorte que ses associés sont redevables de l’impôt sur le revenu dû en France comme s’ils détenaient personnellement le bien immobilier.

En France, si le bien n’est pas loué, l’impôt « se limite » à la taxe foncière et à la taxe d’habitation, et le cas échéant à l’IFI (l’impôt sur la fortune immobilière si le bien a une valeur égale ou supérieure à 1.300.000 €). Si le bien est loué, l’impôt sur le revenu sera enrôlé au titre de revenu immobilier et réclamé à l’associé résident belge.

En Belgique, la Cour de Cassation (arrêt du 29 septembre 2016) a reconnu la personnalité juridique des SCI en droit interne. Ceci signifie que tant que la société ne distribue pas de revenus, les associés d’une SCI française ne doivent pas mentionner de revenu immobilier dans leur déclaration à l’impôt des personnes physiques. Cette décision n’empêche que les associés soient éventuellement redevables en France de l’impôt sur le revenu immobilier si le bien était loué puisqu’il y a transparence fiscale. Ceci implique un traitement différencié :

- l’associé d’une SCI sera considéré en France comme percevant un revenu immobilier qui sera imposé à ce titre ;

- en Belgique, l’associé ne sera pas redevable de l’impôt sur ce revenu immobilier puisqu’il est censé avoir été perçu par une société française dotée de la personnalité juridique. Cependant si la société verse ce revenu, qui sera distribué sous la forme d’un dividende, celui-ci sera taxé au taux de 30 %.

Ce régime fiscal ne change pas lorsque la nouvelle convention préventive de la double imposition sera entrée en vigueur.

La nouvelle convention intègre en revanche un régime particulier de taxation des plus-values sur parts ou actions. L’actuelle convention (en vigueur jusqu’au 1er janvier 2023) prévoit que lorsqu’un résident belge cède avec réalisation d’une plus-value des parts d’une SCI française, le pouvoir d’imposition appartient à la Belgique. Or, en Belgique, la plus-value ainsi obtenue relève de la gestion normale du patrimoine privée et n’est pas imposée.

Le Conseil d’Etat français avait cependant rendu le 24 février 2020 une décision au terme de laquelle la cession de parts d’une SCI française détenant des biens immobiliers représentant (directement ou indirectement) plus de 50% de son actif devait être considérée comme la cession d’un bien immobilier.

D’après la convention, chaque Etat est libre d’attribuer aux biens immobiliers situés sur son territoire et aux revenus produits par ces biens le sens qu’ils ont selon son droit interne. Ces dispositions impliquent que la plus-value obtenue en cas de cession d’un bien immeuble situé en France est imposable en France. L’impôt y est dû sur une base déterminée après déduction de certains frais réels ou forfaitaires, et d’un abattement eu égard à la durée de détention du bien cédé, au taux de 19 %. A cet impôt, s’ajoutent les prélèvements sociaux dont le taux s’élève à 7,5 % pour les ressortissants d’un Etat-membre de l’U.E.

Cette décision du Conseil d’Etat français a été critiquée. Mais, l’esprit de cette décision a été repris dans un article de la nouvelle convention (article 13). Par conséquent, si un résident belge vend des parts d’une SCI dont l’actif est constitué à plus de 50 % de biens immeubles situés en France, il sera redevable en France de l’impôt et des prélèvements sociaux exposés ci-dessus sur la plus-value qu’il aura réalisée (donc la base imposable est déterminée selon des règles particulières).

L’intérêt de la constitution d’une SCI pour acquérir ou détenir un bien immobilier situé en France se voit nettement réduit. En matière de droits de succession, le raisonnement lié à la notion de prépondérance immobilière ne peut s’appliquer, la Cour de Cassation française, ayant décidé, contrairement au Conseil d’Etat, que les parts d’une SCI relevaient de la catégorie des biens mobiliers, lesquels sont imposables aux droits de succession dans l’Etat de résidence du défunt. Mais là également, l’intérêt d’une SCI fait défaut, si ce n’est pour soumettre la transmission de ses parts aux droits de succession belges …

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