La fin de la vie privée : quand le Big Data rencontre Big Brother

Pauvre George Orwell. Il y a soixante-dix ans, lorsque l'écrivain britannique publia son célèbre roman dystopique, le public fut stupéfait par sa vision effrayante d'un futur État totalitaire mondial dans lequel la « Police de la Pensée » surveillait les citoyens en permanence au travers de « télécrans » à double sens.

 

Jadis qualifié de prophétique, 1984 a été rattrapé par la réalité.

Aujourd'hui, nous attachons globalement peu d'importance à la surveillance de masse, saluant d'un clin d'œil les centaines de millions de caméras de vidéosurveillance actuellement en service à travers le monde, dont plus de 170 millions pour la Chine à elle seule. Selon le gouvernement chinois, 400 millions de caméras supplémentaires seront installées d'ici à 2020, formant un réseau national de vidéosurveillance qui, selon Pékin, sera « omniprésent, totalement interconnecté, toujours opérationnel et entièrement contrôlable ».

Parallèlement, malgré une législation qui affirme le contraire, la collecte de données individuelles de plus en plus détaillées ne semble pas non plus nous déranger outre mesure.

Nous « likons » allègrement les messages Facebook, ne prêtons aucune attention aux annonces Google étrangement bien ciblées et installons des assistants Amazon à commande vocale dans nos maisons. Nous acceptons d'innombrables cookies tous les jours, sans trop prendre la peine de lire les clauses en petits caractères.

On se dit que nous n’avons rien à cacher, alors pourquoi résister à la marche inéluctable du progrès technologique ? La fin de la vie privée semble être un prix minime à payer pour se sentir plus en sécurité, sans parler de la possibilité d'effectuer des achats en ligne n'importe où, n'importe quand, via des applications qui se souviennent de notre tour de taille et savent que nous préférons le bleu au noir.

En Chine, les caméras de vidéosurveillance installées à chaque coin de rue sont dotées de logiciels avancés de reconnaissance faciale, dont certains n'ont même pas besoin d'enregistrer un visage pour identifier son propriétaire. À Pékin et Shanghai, les autorités ont récemment commencé à déployer un nouvel outil de surveillance qui permet d'identifier les personnes en fonction de leur façon de marcher ou de leur silhouette.

La nation la plus peuplée au monde compte bâtir un secteur national de l'intelligence artificielle de 150 milliards de dollars d'ici à 2030 dans le cadre d'un vaste « système de crédit social », dans lequel chaque individu sera classé selon un « score social ».

Le Big Data rencontrera ainsi Big Brother, et les citoyens seront classés sur une liste publique. Sanctionnés pour mauvaise conduite, selon le jugement de l'État, les contrevenants pourront se voir refuser le droit de voyager à l'étranger, ainsi que l'accès aux écoles privées, aux hôtels du pays, à certaines offres d'emploi et, paradoxalement, à Internet haut débit.

Si cela peut sembler inconcevable et incroyablement Orwellien à nous autres Occidentaux, détrompez-vous. Ou en tout cas, regardez les choses différemment.

La législation historique du Règlement général européen sur la protection des données, introduit en mai 2018, peut régir la manière dont les entreprises stockent et utilisent les données individuelles, mais même les législateurs les mieux intentionnés peineront à suivre le rythme des avancées technologiques.

Prenez l'exemple de Facebook, qui connut sa première vague de réactions négatives de la part des consommateurs en 2006 lorsqu'il lança son « fil d'actualité », bien que le service soit devenu par la suite l'un des principaux moteurs du succès de l'entreprise. Ce n'était que la première d'une longue série de conflits avec les utilisateurs et les organismes de réglementation sur des questions comme la vente de données privées à des tiers, le vol massif de données non déclaré, l'ingérence étrangère dans les processus électoraux ou encore les tentatives de manipulation mentale.

Certes, l'entreprise possède une copie de chaque message et de chaque fichier que vous avez envoyé ou reçu, de tous les contacts enregistrés dans votre téléphone et de tous les messages audio que vous avez envoyés ou reçus. Mais le volume de données collectées par Facebook est dérisoire comparé à celui de Google, qui mémorise votre historique de recherche sur tous vos appareils et crée des profils individuels (vendus à des annonceurs) en fonction de votre lieu, sexe, âge, orientation politique, carrière, situation de famille, ainsi que de vos loisirs, intérêts et revenus.

Si la fin de la vie privée semble inévitable, un facteur mérite d'être souligné : l'essor de l'investissement durable, responsable et à impact social (ISR). Fin 2017, un dollar sur quatre (soit 12 000 milliards de dollars) était investi aux États-Unis dans le cadre d'une stratégie ISR.

À une époque où l'investissement socialement responsable est plus important que jamais, la croissance à long terme des secteurs qui portent atteinte aux libertés individuelles pourrait, un jour, être compromise.

Toutefois, pour l'heure, rien ne semble indiquer que le vent va tourner. Dans nos maisons et nos lieux de travail, dans nos voitures et dans la rue, les données nous concernant sont constamment recueillies et analysées. Nous sommes tous suivis et localisés, observés et identifiés, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, d'une manière que même George Orwell aurait trouvée inimaginable.

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