« Quand nous étions petits, mes frères, ma sœur et moi faisions déjà du cidre de façon artisanale avec les pommes de nos vergers au cœur des Ardennes françaises, dans une propriété construite par nos ancêtres de Wignacourt, en 1710. Cette demeure appartient toujours à la famille aujourd’hui, » raconte Édouard.
Avec leur background professionnel respectif — une expérience de près de dix ans dans les champagnes Taittinger pour Édouard et un doctorat en chimie pour Thierry, doué en assemblages — l’idée de produire du cidre est venue naturellement. Leur objectif est de redynamiser et rajeunir l’image de la boisson, loin du vieux cliché des crêpes bretonnes ou normandes. Leur sœur cadette, qui vit à Londres, participe aussi à l’affaire familiale, dans un pays où le cidre est très populaire.
Il y a tout juste deux ans, le duo produisait une première cuvée de 3 000 bouteilles, vendue de façon assez confidentielle dans quelques restaurants d’amis, à Bruxelles d’abord et à Anvers ensuite. Sans réel marketing, juste pour tester la réaction du marché…
On a tout de suite vu que le phénomène prenait ! Le cidre est une alternative sympathique à la bière, notamment pour la clientèle féminine. Il est peu alcoolisé, 4,5 degrés, et est 100 % naturel, à base de pur jus de pommes. Le format de 33 cl est nouveau et idéal pour un apéro ! C’est un alcool léger et peu calorique : naturellement sans gluten ni sucre ajouté, il ne contient que du fruit. Très frais, il peut se décliner en cocktails avec du gin ou de l’Aperol et se boire en terrasse entre amis ! »
Selon une étude récente, le marché du cidre a progressé de plus de 26 % en Belgique, en 2016. La croissance est donc au rendez-vous pour ces entrepreneurs aux idées innovantes. Depuis mars 2017, de nouveaux produits ont vu le jour, dont notamment une bouteille de 75 cl destinée aux épiceries fines ou magasins bio. « Nous avons aussi développé une nouvelle gamme de cidres rosés. Comme pour le champagne, on a eu l’idée de créer un assemblage et d’intégrer 12 % de jus de raisin, ce qui amène cette couleur rosée naturelle et un goût atypique de jus de raisin frais. C’est une façon de découvrir le cidre autrement, notamment pour les gens qui n’aiment pas le goût de la pomme. C’est un produit subtil, qui sera parfait pour les brunchs ou les lunchs », commente Édouard.
Les produits Wignac sont évidemment très différents du cidre industriel : le cidre est naturel, sans sucre ajouté ni colorant. Les recettes sont testées en pensant aux envies du consommateur final. D’autres projets sont aujourd’hui en cours, pour continuer à se démarquer des grands producteurs.
Côté publicité, notre sœur développe notre communication sur les réseaux sociaux, elle y raconte notre histoire et partage nos messages. Comme le marketing est essentiel, nous avons essayé de concevoir un beau graphisme, de belles illustrations pour créer un univers propre : on y retrouve le côté Belle Époque, mais avec une touche plutôt décalée… ».
L’entreprise collabore avec trois partenaires distributeurs en Wallonie, en Flandre et à Bruxelles. La distribution s’opère également via l’HORECA, les bars à vins, les cavistes et quelques magasins de qualité comme Färm, Sequoia, Cru. En France, le marché se développe grâce au réseau Taittinger. À Londres, Cidre Wignac vient de signer un contrat avec un distributeur.
Derrière le cidre Wignac, il y a un vrai projet agricole. L’entreprise compte replanter des vergers l’hiver prochain dans les Ardennes françaises et redonner ainsi de l’élan à une région économiquement touchée.
Les recettes sont développées avec l’aide d’un cidriculteur de la région, situé à 15 km de la propriété. Après quelques semaines de fermentation, l’équipe procède à l’assemblage des différents jus et à la mise en bouteille.
Notre recette comprend 65 % de pommes à cidre, plus acides, et 35 % de pommes à couteau ». Notre objectif est de produire notre propre stock pour une année. »
Choisir la bonne provenance des pommes en agriculture raisonnée, créer ses propres vergers, de la valeur et de l’emploi sont des thèmes chers à l’entreprise. Cidre Wignac va sortir prochainement une nouvelle gamme bio.
L’aspect durable nous tient à cœur, c’est une tendance qui se confirme dans le monde entier et ce n’est donc pas un effet de mode. Le volet social est important, c’est pourquoi nous travaillons avec une entreprise de travail adapté pour notre stock à Bruxelles. »
Continuer à développer le marché belge, son premier marché, et s’y implanter davantage est la priorité pour les jeunes managers. Mais à l’avenir, c’est en explorant commercialement les pays limitrophes comme la France, la Suisse, l’Allemagne, que l’entreprise va grandir et atteindre ses objectifs de croissance. De 70 000 bouteilles en 2017, l’entreprise compte atteindre une production de 200 000 bouteilles en 2018. Et ensuite, pourquoi pas, traverser l’océan vers les États-Unis voire vers l’Asie ? « Les Asiatiques apprécient les produits européens, car ils aiment l’histoire sous- jacente qui les entoure, ils disposent aussi d’un haut pouvoir d’achat… Notre ambition est de nous développer progressivement sans brûler les étapes, d’arriver à produire un volume plus important tout en préservant l’aspect naturel de nos produits et d’investir dans du personnel, » déclare Édouard.
