Taxation des plus-values sur les actifs financiers

Vendredi 18 juillet, le gouvernement Arizona s’est accordé sur un avant-projet de loi relatif à la taxation des plus-values sur actifs financiers. Le texte de l’avant-projet n’a pas encore été déposé au parlement, mais les grands principes sont déjà connus et nous les résumons ci-dessous.

Qui est concerné ?

L’imposition des plus-values concernera les personnes physiques résidentes belges et les entités soumises à l’impôt des personnes morales (par exemple, les ASBL et fondations), sauf s’il s’agit d’entités pouvant recevoir des dons fiscalement déductibles. 

Les sociétés (elles sont déjà imposées sur les plus-values réalisées, sauf exceptions) et les non-résidents ne sont pas touchés par ces nouvelles dispositions.

Quels sont les actifs financiers visés?

Le nouveau régime vise les plus-values réalisées sur les « actifs financiers ». Cette notion est définie de manière large et englobe notamment:

  • les actions cotées ou non, obligations, parts de fonds d’investissement, parts d’organismes de placement collectifs (sicav), contrats d’option, contrats à terme (futures), contrats d’échange, Exchange-Traded Funds (ETF) et Exchange-Traded Notes (ETN),

  • les contrats d’assurance type branche 21, 23 et 26,

  • les cryptoactifs,

  • les devises et l’or d’investissement.

Les pensions complémentaires du deuxième pilier (assurance groupe, fonds de pension, PLCI) et troisième piler (épargne-pension et épargne à long terme) sont expressément exclues du régime.   

Quelles sont les opérations visées?

L’imposition de la plus-value a lieu lors de la cession à titre onéreux des actifs décrits ci-dessus (exemple: une vente ou un échange). Les plus-values non réalisées (ou dites « latentes ») ne sont pas taxables. 
Deux opérations sont assimilées à une cession à titre onéreux et génèrent l’imposition de la plus-value:

  1. la liquidation des contrats d’assurance en cas de vie;
  2. le transfert du domicile ou du siège de la fortune du contribuable à l’étranger. Il s’agit d’un régime d’exit tax. L’imposition serait alors calculée sur la plus-value que le contribuable aurait réalisée s’il avait cédé ses actifs financiers le jour de son départ. Cependant, le paiement de cet impôt est reporté 
    • de manière automatique si le contribuable déménage vers un état membre de l’Union Européenne, de l’Espace économique européen ou un pays lié à la Belgique par une convention fiscale;
    • à la demande du contribuable et moyennant constitution d’une garantie dans les autres cas. 

Le report de paiement, automatique ou la demande, est prolongé chaque année à condition que les actifs ne soient pas vendus et qu’une attestation annuelle soit transmise à l’administration. 

L’obligation de paiement de la taxe s’éteint si le contribuable revient s’établir en Belgique ou s’il n’a pas cédé ses avoirs dans un délai de 24 mois après son déménagement. 

Les donations et les successions n'entraînent pas d'imposition. Toutefois, pour déterminer la plus-value lorsque le donataire ou l’héritier revendra les biens reçus, il sera tenu compte de la valeur historique d’acquisition dans le chef du donateur ou du défunt (voir ci-dessous). 

Quel est le taux d’imposition?

Les plus-values sont réparties en trois catégories, donnant lieu à trois régimes d’imposition distincts: 

Catégorie 1: les plus-values internes

Une plus-value dite « interne » sur des actions est réalisée à l’occasion de la cession d'actions par un contribuable à une société qu'il contrôle directement ou indirectement, lui-même ou avec ses descendants, ascendants et collatéraux jusqu’au deuxième degré et ceux de son conjoint. Ces plus-values seront taxées à 33 %. Il n’y a pas d’exemption prévue.

Catégorie 2 : les plus-values sur participations substantielles 

Lorsque le cédant réalise une plus-value sur des actions ou parts s’il détient au moins 20 % des droits d'une société dont les actions ou parts sont cédées, un régime progressif s’applique, lequel prévoit : 

  • une exonération jusqu’à 1.000.000 € tous les 5 ans ;
  • une taxation progressive par tranches de 1,25% à 10% (sauf si l’acheteur est établi hors de l’Espace économique européen : le taux est alors de 16,5%).
De 1.000.000€ à 2.500.000€ 1,25%
De 2.5000.000€ à 5.000.000€ 2,5%
De 5.000.000€ à 10.000.000€ 5%
Au-delà de 10.000.000€ 10%

Catégorie 3 : les plus-values sur tous les autres actifs financiers 

Les plus-values sur ces actifs seront taxées à 10 %. Toutefois, une exonération de 10.000€ (montant indexé) sera applicable. Si cette exonération n’est pas utilisée, elle peut être reportée à hauteur de 1.000€ par an sur cinq exercices d’imposition. Ainsi, si le contribuable n’a pas du tout revendiqué d’exonération pendant 5 ans, le montant maximum de l’exonération auquel il aura droit la cinquième année, s’élèvera à 15.000€. 

Qu’en est-il des actuels régimes de taxation des plus-values?

Ces régimes sont maintenus et coexisteront ; il s’agit des situations suivantes : 

  • Fonds d’investissement obligataires (dont l’actif est investi à concurrence d’au moins 10% en obligations ou dépôts). Actuellement, un précompte mobilier de 30% est retenu sur la partie de la plus-value provenant des investissements en obligations ou dépôts. Ces revenus soumis au précompte mobilier de 30% seraient déduits de la plus-value taxable à 10% afin d’éviter une double imposition.

  • Plus-values qui excèdent la gestion normale d’un patrimoine privé : ces plus-values restent taxables au taux de 33% (augmenté des centimes additionnels communaux). Ainsi, si la vente de cryptoactifs est considérée comme dépassant la gestion normale d’un patrimoine privé, la plus-value réalisée est imposée à un taux de 33% au lieu de 10%. 

Comment est déterminée la plus-value imposable ?

La plus-value consiste dans la différence positive entre le prix de cession et la valeur d’acquisition. Les frais et taxes liées à l’acquisition ne sont pas déductibles.

La valeur d’acquisition est définie comme étant la valeur d’acquisition par le contribuable lui-même ou par son « prédécesseur en droit ». Par conséquent, si le contribuable cède des actions qu’il a reçues par donation ou succession, la valeur d'acquisition initiale dans le chef du donateur ou du défunt sera prise en compte pour déterminer la plus-value. 

Des règles spécifiques sont définies pour les contrats d’assurance, les actions acquises dans le cadre de plans d'options (« stock-options ») et les actions acquises avec réduction de prix. Ainsi, dans le cas des contrats d’assurance, la plus-value correspond à la différence entre le montant liquidé (en cas de rachat ou d’expiration du contrat) et les primes payées. 

Quelques précisions pour le calcul de la plus-value:

  •  si le contribuable détient plusieurs actifs financiers identiques achetés successivement, le premier actif acquis est censé être le premier actif cédé (méthode first in first out, dite « FIFO »);

  • si le prix d’acquisition ou de cession est exprimé en devises, ce prix d'acquisition et/ou de cession sera converti en euros au cours de change en vigueur au moment de l'acquisition et/ou de la cession de l'actif financier;

  • si le prix d’acquisition n’est pas connu, la taxe de 10% s’appliquera sur le prix de vente;

  • pour les nouveaux résidents belges, la valeur d’acquisition est valeur au moment du transfert de résidence en Belgique.  

Pour les actifs acquis avant le 1er janvier 2026, la plus-value correspondra au prix de cession diminué de la valeur des actifs au 31 décembre 2025. Toutefois, pour les cessions réalisées jusqu’au 31 décembre 2030, le contribuable à la possibilité de « choisir » entre cette valeur au 31 décembre 2025 et la véritable valeur d’acquisition, pour autant qu’il puisse la démontrer et qu’il déclare lui-même les plus-values (cf. opt-out ci-dessous). 

Le projet contient différentes règles permettant de déterminer la valeur des actifs au 31 décembre 2025: 

  • Pour les actifs côtés, il s’agirait du dernier cours de clôture de l’année 2025.

  • Pour les actifs non cotés, le texte renvoie à la valeur d’acquisition la plus élevée entre:

    • une valeur qui aurait été attribuée aux actions lors d’une opération de vente ou d’augmentation de capital effectuée en 2025 ou

    • une valeur reprise dans une offre contractuelle en vigueur le 1er janvier 2026 ou

    • une formule basée sur les capitaux propres augmentés d’un montant égal à quatre fois l’EBITDA du dernier exercice clos avant le 1er janvier 2026. Si le contribuable estime que cette valeur ne correspond pas à la valeur des actions, il aurait la possibilité de déterminer cette valeur par un réviseur d'entreprises ou un expert-comptable indépendant certifié. Ce dernier aurait jusqu'au 31 décembre 2026 au plus tard pour établir la valeur des actions au 31 décembre 2025. 

Les moins-values sont-elles déductibles?

Les moins-values seront déductibles des plus-values sur la même catégorie d’actifs (voir les 3 catégories supra: plus-values internes, plus-values sur participations substantielles et plus-values sur autres actifs financiers), à condition qu’elles soient réalisées la même année par le même contribuable. Les moins-values ne peuvent être reportées d’une année à l’autre. 

Par exemple, un contribuable peut compenser une perte réalisée sur un produit d'assurance par une plus-value réalisée sur un produit bancaire lorsqu'elle se produit au cours de la même période imposable. 

Pour le calcul de la moins-value, il est tenu compte du prix moyen d’acquisition par actif financier tel que connu au 31 décembre 2025 ; la méthode FIFO n’est donc pas applicable pour les moins-values. 

Pour les actifs financiers acquis avant le 1er janvier 2026, la moins-value s'entend de la différence négative entre le prix reçu et la valeur de ces actifs financiers au 31 décembre 2025. 

La déduction des moins-values devra être demandée par le biais de la déclaration fiscale annuelle.

Comment l’imposition sera-t-elle établie?

En principe, les établissements financiers établis en Belgique prélèveront un précompte mobilier de 10% au moment de la réalisation de la plus-value sur les actifs financiers.

  •  Le précompte de 10% sera calculé sur la plus-value, sans tenir compte de l’exonération de 10.000€ ni des moins-values éventuelles, ni de valeur réelle d’acquisition pour les actifs acquis avant le 1er janvier 2026.

  • Le bénéfice de l’exonération de 10.000€, la déduction des moins-values et/ou l’application de la valeur réelle d’acquisition avant le 31 décembre 2025 devront être demandés par le contribuable dans sa déclaration fiscale. Si les plus-values ont dépassé le montant de l’exonération de 10.000€, le contribuable ne devrait pas déclarer la totalité des plus-values pour bénéficier de cette exonération, mais pourrait se contenter de déclarer un montant de plus-values équivalent à 10.000 €.

Par ailleurs, le contribuable pourrait choisir de déclarer lui-même ses plus-values plutôt que celles-ci soient l’objet du précompte mobilier prélevé par l’établissement financier ; c’est le mécanisme de l’opt-out.  Si le contribuable choisit l’opt-out, il doit en informer tous ses établissements financiers. Ce choix s’applique alors à tous les établissements et à toutes les plus-values. Par conséquent, il devra mentionner toutes ses plus-values dans sa déclaration fiscale. En cas d’indivision, tous les titulaires d’un compte doivent s’opposer à la retenue du précompte mobilier. 

Les plus-values suivantes seront exclusivement taxées par voie de déclaration par le contribuable : 

  1.    les plus-values sur participations substantielles;
    2.    les plus-values internes;
    3.    les plus-values sur les cryptoactifs;
    4.    les plus-values sur les devises et l'or d'investissement.

En ce qui concerne les plus-values sur participations substantielles et les plus-values internes, un mécanisme est mis en place pour s’assurer que ces plus-values seront bien soumises à taxation. Ainsi, il est demandé aux intermédiaires participant à des opérations générant des plus-values internes ou plus-values sur participations substantielles de déclarer ces opérations à l’administration fiscale.

Intéressés ?  N’hésitez pas à nous contacter 

Ce résumé se base sur des textes et commentaires disponibles au moment de sa rédaction. L’avant-projet de loi sur lequel le gouvernement s’est accordé en première lecture doit encore être soumis à avis du conseil d’état et voté par le parlement. Nous vous tiendrons bien entendu informés des prochaines avancées en la matière. 

Le Département Wealth Planning & Structuring se tient à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.

Contactez-nous